
Qui suis-je ?
Séverine Sarrias raconte des histoires depuis une quinzaine d’année. Elle est Altigérienne. Elle est née dans une famille originaire de la Margeride, plateau d’altitude du massif central où sévit durant le XVIIIème siècle la Bête du Gévaudan. C’est à travers cette légende et d’autres contes racontés par sa grand-mère et sa mère que Séverine, déjà toute petite, a été imprégnée par la littérature orale.
Après quelques années professionnelles passées sur les chemins de l’éducation à l’environnement, ses pas l’ont ramenée vers le conte. Et c’est avec une grande curiosité et un immense plaisir qu’elle a redécouvert les histoires qui avaient bercé son enfance. Mais cette fois avec l’envie de les partager avec les autres. Aussi Séverine s’est formée au conte auprès de Kamel Guennoun, Michel Hindenoch, Françoise Diep et Marc Aubaret du CMLO (Centre Méditerranéen de Littérature Orale).

La collecte de récits de vie
En 2009, elle se lance dans une collecte de récits de vie auprès des civils qui ont subi les affres de la seconde guerre mondiale sur le territoire de la Margeride. C’est ainsi qu’elle crée en 2012 le spectacle « Le chemisier jaune ». A travers cette création, elle donne la parole à celles et ceux qui ne l’ont pas eue, à celles et ceux qui furent meurtris dans leur chair et dans leur âme sans pouvoir se dire.
Pour Séverine, interroger cette parole qui date de 80 ans nous permet d’interroger notre monde contemporain qui n’a de cesse d’être déchiré par des guerres.
Cette première création se fera en collaboration avec Arnaud Cance chanteur et musicien traditionnel de culture occitane.

L’occitan,
cette langue minoritaire de la moitié sud de la France, qui fut la langue maternelle de ses parents résonne dans ses récits. Séverine souhaite mettre en valeur la culture de ces soit disant « petites gens » que nous avons tendance à marginaliser, à dénigrer. Aussi, en 2019, une nouvelle création « Nannette ou l’arbre merveilleux » viendra étayer sa volonté de mettre en lumière la langue et la culture occitane qui l’a en partie construite. Ici, Séverine évoque la vie de Nannette Lévesque conteuse du XIXème siècle, raconte et chante une partie de son répertoire.
L’engagement…
Son expérience professionnelle dans le domaine de l’environnement est une source dans laquelle elle puise régulièrement pour nourrir ses récits. D’ailleurs, pour Séverine, la littérature orale a aussi un rôle à jouer dans le tissage des liens entre l’Homme et la Nature. C’est pour cette raison qu’elle propose des balades contées afin que l’imaginaire puisse être un vecteur de la protection de l’environnement. La visite de la forêt sacrée de Kpassè au Bénin, lors sa participation aux Rencontres Internationales des Arts de l’Oralité (RIAO) 2021, n’ont fait que renforcer ce sentiment.

Les RIAO 2021, auront profondément marqué la conteuse et la poussent à interroger encore plus profondément sa propre culture, la place que le monde occidental et la mondialisation laissent à la littérature orale et aux langues minoritaires dans notre quotidien. Littérature orale et langues minoritaires qui permettent d’avoir une autre lecture du monde et de rencontrer l’autre dans toute sa complexité.
La transmission…
Séverine souhaite que la parole contée ait un rôle à jouer dans l’éducation des tout-petits. Aussi, en collaboration avec des Relais d’Assistantes Maternelles, elle lance des ateliers de transmission de jeux de doigts, de comptines… auprès des professionnels de la petite enfance. Pour Séverine, ces petites formes conduisent l’adulte conteur et l’enfant dans une relation autre que la relation pragmatique et rationnelle. Elles mènent à sortir de la parole quotidienne et permettent de rentrer dans une parole symbolique et poétique. De cette expérience naîtra le spectacle « Poma ! » avec la complicité d’Arnaud Cance.

Elle intervient aussi en milieu scolaire pour raconter et aussi pour proposer des ateliers « graines de conteurs » et de composition d’histoires. Ces ateliers sont pour elle, des temps qui permettent aux enfants de prendre la parole, participent à la construction de leur propre pensée et offre l’occasion à ses jeunes pousses de s’armer de la force des mots pour s’exprimer. C’est aussi, l’opportunité pour eux de travailler et de développer leur propre imaginaire.
« Cet imaginaire qui nous permet de dépasser un réel parfois très dur, et qui nous offre la possibilité d’imaginer d’autres demains. »